Pour l’édition de mon premier roman De la Naissance des Monstres, j’ai décidé de lever des fonds via une campagne participative. Ça a été un succès : on a atteint 300% de l’objectif fixé !
Ma campagne Ulule s’est déroulée sur 30 jours pendant le mois d’octobre 2021 et je vous propose aujourd’hui un retour sur cette expérience.
Vous trouverez pléthore de conseils pour réussir sa campagne de financement un peu partout sur le web, ici je ne partage que mon ressenti et ma propre expérience pour financer un roman en auto-édition, sur la plateforme Ulule.
Pourquoi coupler l’auto-édition à une campagne de financement ?
Tout d’abord, quel est l’intérêt de s’embêter avec une campagne Ulule quand, aujourd’hui, tout le monde peut s’auto-éditer sur Amazon KDP ou se publier via des plateformes d’impressions à la demande ?
Pour moi, les avantages d’une campagne de financement participative tenaient à :
- pouvoir se constituer un stock de romans broché (papier) en pouvant estimer le nombre de lecteurices potentiellement intéressé-es
- créer de l’engouement autour de son projet, que ce soit auprès de sa communauté existante ou en touchant de nouvelles personnes
- proposer des goodies exclusifs à la campagne
Ulule m’a permis non seulement d’estimer assez précisément le nombre d’exemplaires à imprimer (et éviter de commander trop et de devoir stocker un volume trop important), mais aussi de marquer symboliquement la publication du roman en proposant des goodies exclusifs, et ainsi récompenser les lecteurices qui soutiennent ce lancement.
Pour « De la Naissance des Monstres », j’avais proposé des cartes postales illustrées de mes personnages, des carnets personnalisés, une carte dessinée de l’univers et des sous-verre, selon les packs et selon les paliers débloqués au fur et à mesure, et ces cadeaux n’ont été disponibles que durant la campagne !
1. Bien se renseigner avant de se lancer
Mon premier conseil serait de bien se renseigner en amont sur ce qu’implique de lancer une campagne Ulule. La préparation demande beaucoup, beaucoup, de temps et toutes les décisions nous appartiennent (du choix de la date, aux contenus des packs, en passant par le choix des prestataires).
Ce n’est pas pour tout le monde et ça dépend du caractère de chacun. Ça n’a rien d’inaccessible pour autant, mais il vaut mieux savoir dans quoi on s’embarque :
- Combien de temps avez-vous à consacrer par jour à cette préparation ?
- Allez-vous tout gérer seul ou le déléguer à quelqu’un ?
- Comment gérez-vous le stress ?
Faire le point sur vos ressources me semble important : on n’a pas tous la même charge mentale au quotidien, la même énergie, ni le même temps disponible face à un projet d’auto-édition. Connaître ses points faibles peut permettre de les anticiper ou même de reconnaître que ce n’est pas fait pour vous (et ce n’est pas grave).
2. Se fixer un objectif réaliste
C’est une réflexion importante qui va rejoindre une question que vous allez devoir présenter à vos futurs soutiens : à quoi va servir l’argent recueilli ?
Il va falloir vous poser et lister ce que vous souhaitez financer, la somme que vous pouvez avancer de votre poche.
Ulule fonctionne sur le principe de tout ou rien, si la campagne n’atteint pas les 100%, vous perdez tout.
Il ne faut donc pas être trop gourmand et rester réaliste.
Personnellement, j’avais déjà avancé les frais d’illustration et de correction du roman, et l’objectif de la campagne devait me permettre de financer l’impression de mon stock (et la création des goodies disponibles pendant la campagne) et le coût (astronomique) des envois postaux (frais d’emballage et frais d’envois).
J’avais fait mes devis en amont sur les goodies que je voulais proposer (pour des marque-pages, des cartes de visite, l’impression de mes cartes postales, des carnets, des sous verres, etc)(j’ai abandonné au passage des idées de goodies très sympas mais au coût de production ou de livraison trop élevé pour moi), j’avais choisi mon imprimeur (Booksfactory en l’occurrence) et j’avais une idée des tarifs (indécents) de la Poste.
Dans mon cas, d’après mes calculs, j’avais besoin de 1200€.
À ce stade, l’auteurice peu confiante et angoissée que je suis estimait cette somme énorme, et j’avais du mal à estimer l’engagement possible de ma communauté (les gens ont beau vous suivre sur les réseaux sociaux, au moment de sortir la CB, c’est une autre histoire)
J’ai donc mis comme objectif de campagne un peu moins de 1000€, qui me semblait un seuil psychologique plus acceptable.
La plupart des auteurices en auto-édition auront besoin entre 800 et 1500€ pour financer l’impression de leur livre ce qui est une somme tout à fait correcte.
Sur « De la Naissance des Monstres », on atteint les 100% en 1 journée et j’ai pu souffler de soulagement et me concentrer sur les paliers que j’avais proposés, qui permettaient de débloquer de nouveaux goodies.
À la fin du mois, on atteignait 319% de l’objectif initial, pour une somme de 2555€ !
3. Faire (et refaire) ses calculs
Ma plus grande peur (après celle de faire un flop colossal), c’était de me planter dans mes calculs et de me retrouver à envoyer mes romans à perte.
Vues les sommes avancées, autant être un minimum rentable !
Jamais dans ma vie d’autrice, je n’aurais pensé passer autant de temps sur des tableurs Excel, et je peux vous dire que j’y ai passé des soirées ! Parce qu’il faut penser à tout. Au coût de production du roman, évidemment, mais aussi à ceux des goodies qu’on propose. Au poids du roman (qu’on ne connaît pas encore la plupart du temps, si on est encore en phase de correction), au poids / format des goodies, aux emballages qu’on va utiliser et leur coût.
Les prix choisis pour chaque pack vont dépendre de ces coûts de production et d’envoi.
Pour une première campagne, j’ai préféré partir sur des goodies, pas trop lourds ni encombrants, faciles à envoyer et à concevoir auprès de prestataires fiables.
Il ne faut pas oublier de retirer la marge qu’Ulule se prend (8%), les cotisations sociales liées à votre statut et votre taux d’imposition !
Bref, ça peut vite devenir un vrai casse-tête quand vous ajustez le poids de votre roman, ou des packs proposés et que vous comparez les devis de vos fournisseurs (attention d’ailleurs à ne pas confondre prix HT et TTC sur vos devis, 20% de différence, ça fait beaucoup !)
Je dois une gratitude immense à celleux qui partagent des tableaux avec des formules toutes faites, dont celui d’Astate qui m’a énormément aidé (et qui revient également dans cet article sur sa propre campagne) : template d’Astate à télécharger.
4. Avoir une liste de soutiens fiables
Une fois, l’objectif et le prix des packs calés, il est plutôt facile de savoir combien de personnes doivent acheter votre pack phare (souvent le roman papier seul) pour arriver à votre objectif.
Pour me rassurer, j’avais listé les personnes que je savais intéressées par mon roman et prêtes à participer à la campagne. Ça implique d’avoir parlé de son projet avant le lancement de la campagne. D’ailleurs, même si votre livre n’est pas bouclé avant la campagne Ulule (ce qui est souvent le cas), il faut en parler régulièrement pour susciter l’intérêt.
Ce sont ces gens qu’il faudra contacter et motiver en premier. Ce sont elleux qui doivent donner dès les premiers jours. Il est important que le compteur ne reste pas trop longtemps à zéro, parce que les gens ont tendance à donner volontiers quand le projet paraît crédible.
Personnellement, avoir une liste de soutiens fiables m’a beaucoup rassuré. Je savais sur qui je pouvais compter dès le lancement, ce sont ces personnes qui ont fait décoller mon compteur très rapidement.
Si vous avez une petite communauté, vous avez peut-être dans votre réseau des gens qui eux ont plus d’influence, n’hésitez pas à leur en parler en amont, de les tagguer les jours qui suivent le lancement pour être relayé-e (sans tomber dans le harcèlement bien sûr)
5. Avoir une feuille de route de votre communication
Le mois de campagne passe très vite, et souvent les aléas de la vie quotidienne peuvent prendre le pas sur la campagne, c’est normal.
Pour sa tranquillité d’esprit et pour ne pas se laisser débordé-e, il faut dans l’idéal préparer une liste complète des différentes actions de communication à mener.
- Sur quel réseau social ?
- Quels contenus ?
- Quand / à quel moment / quelle fréquence ?
- Quand relancer qui ?
L’idée, c’est de savoir, même sous l’eau, ce qu’il reste à faire tel jour, sans devoir à le réfléchir sur le coup. Tout doit être au maximum préparé en amont.
Personnellement, j’avais listé mes réseaux sociaux, les types de contenus que je voulais partager, programmé un max de publications, listé les personnes-relais que je savais intéressées par le projet et qui allaient me soutenir pendant la durée de la campagne…
Je n’avais pas écrit en amont les posts à envoyer régulièrement via Ulule pour chaque palier débloqué, et je n’avais pas préparé les visuels adéquats quand on a dépassé les 100%, puis 200%, mais ça aurait pu s’anticiper.
Selon votre temps disponible, vous pouvez prévoir des interactions spontanées évidemment, mais imaginez le pire (oui, c’est l’autrice angoisée qui parle)(soucis familiaux, pas de connexion, grosse migraine, pas d’énergie…) et anticipez ce qui peut être planifié : une fois la campagne lancée, impossible de la mettre en pause !
6. Soigner vos visuels de campagne
Ce conseil est lié au précédent, il est important de préparer vos différents visuels en amont pour ne pas avoir à les bidouiller au dernier moment, pendant la campagne, en stress et sous l’eau !
Une campagne Ulule met en avant le visuel, c’est ce qui accroche l’oeil de votre potentiel contributeur, il est indispensable d’être clair, net et précis dans votre présentation (c’est votre page de vente)
Des outils comme Canva permettent aux néophytes de se baser sur des templates pré-faits très pratiques, mais si vous estimez que le design n’est pas votre point fort, je vous conseille vivement de vous faire accompagner par quelqu’un qui s’y connaît (et/ou d’aller zieuter des campagnes qui ont marché pour vous en inspirer)
Personnellement, en travaillant à côté, je m’étais fait un rétroplanning et j’avais commencé la préparation de ma campagne à peu près trois mois avant le lancement, ce qui comprend :
- devis de l’imprimeur
- différents devis chez des fournisseurs pour les goodies
- préparation d’un plan de communication
- liste des actions de communication
- préparation des visuels
7. Mettre sa timidité au placard
C’est une autrice introvertie en manque de confiance en elle qui vous le dit, c’est le moment de se faire violence !
Si vous ne croyez pas en votre projet, personne ne le fera à votre place (à part si vous avez de super ambassadeurs qui croient en vous)
Mais il n’y a pas de secret : il faut parler de votre projet !
Si vous avez une belle communauté qui vous soutient, tant mieux, ça sera plus facile. Si ce n’est pas le cas, il faut se concentrer sur les gens de votre premier cercle (les amis, la famille, l’entourage proche) et leur rabâcher les oreilles que vous allez avoir besoin d’eux. Pire, que vous allez avoir besoin d’eux, là, dès le début de la campagne ! Beaucoup diront être intéressés, et puis les 30 jours (ou 45) passent vite, très vite, et pas mal rateront le coche à cause des aléas de la vie… il ne faut donc pas hésiter à les relancer !
L’idée, ce n’est pas de spammer tout le monde jusqu’à l’écœurement, mais c’est le moment de mettre en avant votre roman. Dans votre feuille de route, selon vos réseaux sociaux de prédilection, parlez de la genèse de votre projet, de vos personnages, partagez des extraits, vos inspirations… variez les formats et les réseaux, mais parlez de votre roman, répondez à vos commentaires, interagissez ! Personne ne va tomber sur votre campagne Ulule par hasard, partagez le lien de votre page (mieux, mettez-le directement dans votre bio) et soyez créatifs pour amener les gens à venir découvrir votre univers (c’est quand même la partie la plus sympa !)
De mon côté, la première semaine a démarré sur les chapeaux de roue en engageant mon entourage proche et les gens qui me suivaient sur les réseaux sociaux, il y a ensuite eu un creux normal au milieu du mois, et il a fallu remettre un coup de boost la dernière semaine pour faire participer les retardataires (et débloquer certains paliers !), j’ai ainsi pu toucher un cercle plus large de gens que je ne connaissais pas forcément…
8. Prévoir de la marge
Pour être tranquille, prévoyez de bonnes marges dans votre calendrier prévisionnel.
Vous allez devoir indiquer une date indicative d’envois de vos contreparties : prévoyez large !
Que ce soit pour l’impression de vos romans, pour les goodies qui dépendent d’un prestataire externe, les retards sont possibles, et un souci de livraison ou de la marchandise réceptionnée abîmée peut retarder toutes vos expéditions.
De mon côté, j’avais prévu 1 mois de marge, et ça n’a pas été assez : la période des fêtes de fin d’année et des couacs dans la livraison m’ont fait allonger mes délais.
Rien de grave, mais pour avoir l’esprit tranquille, prévoyez large, et tenez au courant vos soutiens, il faut toujours être transparents, les gens sont compréhensifs.
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Au final, la somme récoltée grâce à cette campagne Ulule m’a permis d’imprimer mon roman et de le faire connaître, mais aussi de rembourser les frais que j’avais avancés de ma poche (l’illustratrice de ma couverture, l’illustratrice de mes personnages, le graphiste qui a fait ma mise en page, et la correctrice qui a débusqué tous mes tics de langage). J’ai choisi de ne pas augmenter mon stock d’exemplaires à imprimer et de garder une part qui sera dédiée aux frais de promotions, publicités, envois de service presse ou encore les frais liés à des déplacements en salon, si besoin…
Au-delà du bénéfice financier que m’a apporté ma campagne Uule, l’expérience m’a aussi permis de faire connaître mon univers, de toucher un public plus large que les gens qui me suivent, de créer de l’engouement autour de ce lancement (conseil n°9 : pensez d’ailleurs à fêter ça dignement avant de vous lancer dans la loongue préparation des envois / dédicaces !), et surtout ça m’a donné un énorme boost de confiance en moi, et rien que pour ça, je ne regrette pas de m’être lancée dans cette aventure hyper chronophage et fatigante !
Si vous avez des questions plus précises sur des aspects que j’ai survolés, n’hésitez pas à me contacter !
2 réponses
Bonjour Ellayne,
Je suis en train de préparer une campagne Ulule pour le lancement d’un livre jeunesse.
Comme toi, j’ai prévu une cagnotte de 1000 € pour ne pas me mettre la pression.
Avais-tu 70 % de la cagnotte en précommande avant de démarrer ?
Merci pour ton partage, je suis dans les mêmes conditions émotionnelles que toi lors de la préparation de ta campagne Ulule.
Je ne suis pas sûre de comprendre ta question. Ma campagne Ulule m’a servi à vendre mes précommandes, avant le lancement je n’étais sûre de rien…